Chronique d’un désastre annoncé : la psychiatrie dévastée par Jean-Daniel Matet
Commissions, débats, livres blancs, rien n'y fait : la psychiatrie publique
se meurt. Trouver des coupables est simple, ils ne manquent pas. Les
administrations successives de gouvernements successifs, de droite et de
gauche, ont progressivement déstabilisé toutes les inventions que la situation
de la psychiatrie exigeait depuis la guerre. Les psychiatres privés et publics,
facilement divisés sur des options idéologiques, syndicales, voire
thérapeutiques, sont peu enclins à dégager des solutions pérennes et
cohérentes. Les personnels infirmiers, partagés entre l'ancienne soumission aux
hiérarchies médicales et les nouvelles directives de leur cru, sont tentés de
prendre la roue des directions hospitalières – qui pourtant ne veulent pas que
leur bien. Cent quatre-vingts ans après sa mise en place, la fin d'une
conception de la psychiatrie n'en finit pas de s'annoncer.
Révolution
La reconnaissance du fou comme aliéné, comme malade, portée par les
aliénistes a ouvert la voie de leur traitement. Au terme d’un très long débat
de toutes les tendances de cette Assemblée nationale de la Monarchie de
juillet, les lois d'internement décidèrent du traitement institutionnel à
appliquer aux malades mentaux et imprimèrent pour plus d'un siècle un mode
d'approche de la psychiatrie. De même que chaque village avait son église dans
l'ancien régime, chaque département aurait sa prison et son asile : c’était une
vraie conquête pour l'organisation sociale si l’on se souvient que « l'asile »
accueillait les malades mentaux et toutes les formes de lâchage du lien social,
de la misère extrême des vieillards dépendants aux handicapés de naissance. Une
représentation nationale soucieuse d'une bonne organisation de la République
française au sortir de la Révolution appuya les aliénistes et ce fut décisif.
Une fois le projet national disparu, les psychiatres ne sont plus parvenus à
convaincre ...
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