2 de outubro de 2012

Le Point du Blog : J-6


 

Le Point du Blog : J-6

Question d'autisme : porter les mots ou portée des mots ?

par Claire Piette


Aujourd'hui foisonnent les ouvrages écrits par des psychologues concernant le bien-être et visant à une harmonie avec soi-même ou avec le conjoint.  Cette « littérature » renforce le fantasme des lendemains qui chantent et, à travers ce type de discours prescriptif, dénué de toute poésie, l'expérience singulière est tue, dans le sens où l'expérience des uns pourrait correspondre à l'expérience des autres : l'universel nous attendrait au tournant.

Ceux qui n'arrivent pas à se conformer à ce mieux-être se trouvent réduits à porter les mots, de l'Autre qui, lui, saurait comment faire. Le poids de ces dits alourdit toujours la pesanteur de la culpabilité, redoublée par les mots restés enclos dans celui qui est tourmenté.

Bercés par le rêve du progrès, les auteurs de ces ouvrages croient au métalangage, ignorant par là même leur délire et l'autisme dont ils pâtissent.  Lacan fait un sort au métalangage, et lui préfère la « métalangue » : une langue poétique impliquant la bévue.

Le tour de force de la poésie, quand elle rate - fondée sur l'ambiguïté du sens double -, réside, nous dit Lacan, en ce qu'au lieu de mettre du sens face au trou, elle met à sa place la signification, qualifiée de mot vide : « d'être pur nœud d'un mot avec un autre mot. »[1] L'autisme serait le statut premier de l'être, à savoir la rencontre d'un signifiant avec un corps, avant que le sujet ne se mette à délirer : en produisant du sens pour combler le trou, là où l'Autre ne répond pas.

La séance analytique est une façon de faire l'expérience de cette bévue, d'expérimenter  « un dire qui secourt »[2], un trajet de la parole qui non seulement se coltine le sens mais aussi se confronte à la signification comme « mot vide », à l'impossibilité de tout dire de ce qui nous arrive comme expérience de parlêtre.

L'expérience analytique donne chance à chacun de saisir comment il a écrit un scénario fantasmatique et un circuit pulsionnel qui recouvre le non rapport sexuel.

Puisqu'on ne sort pas du langage qui nous habite, une analyse ne permet pas de sortir du « tourner en rond » mais elle permet d'y tourner autrement.

Par l'analyse, le sujet  n'a pas à répondre à un « prêt à porter » ; cette expérience lui laisse au contraire entrevoir comment se débrouiller avec « ce presque rien » qu'a été la rencontre d'un signifiant avec un corps, une fois le sens exfolié.


[1] Lacan J ., « Vers un nouveau signifiant » in Ornicar, n° 17/18, Navarin, p.9.
[2] Lacan J., « L'insu que sait l'une bévue s'aile a mourre » in Ornicar, n° 14, Navarin, p.6.

Les textes cliniques du blog...

Un baby-footer, par Emmanuel Chenesseau
La machine à serrer, par Philippe Lienhard
TEACCH en France, par  Michel Neycensas
Une peluche entre mère et fille, par  Florence Marion
L'autisme, un signifiant qui interroge, par  Sébastien Dauguet
Corso, un bricoleur, par Frédérique Bouvet
Ça vous a fait un trou ?, par  Gilles Mouillac
Sur la question de l'immuabilité, par  Jean-Marie Molle
Autisme années 2000, par  Michèle Laboureur
Tais-toi et écoute !, par  Léa Caron De Fromentel
Réflexion sur l'évaluation, par  Jean-Charles Troadec
La dernière séance, par  Lydie Lemercier-Gemptel
Derrière la demande des parents, par Julio González
D'un monde à l'autre, par Joëlle Hallet
Le ronron, par Isabelle Rialet-Meneux
A l'Ecole de l'autisme, par  Philippe Chanjou
La leçon de Donna Williams, par  Vilma Coccoz
Parier sur le sujet, par  Joëlle Hallet
Carpe Diem, par Claire Talébian
Familles, solutions, problème, par Eliane Calvet
Le pari des autistes, par Guillermo Crosetto
Il préfère ne pas penser…, par Catherine Stef
Inconscient et Psychanalyse, par David Yemal
Détours et alentours, par Cedric Detienne

Lisez ou relisez sur le blog...

Petite note d'Italie, par Antonio Di Ciaccia
Paradoxes de l'autisme, par Nathalie Charraud
L'autisme, un problème politique, par Francisco-Hugo Freda
La psychanalyse en son cœur, par Philippe De Georges
Des psychanalystes en formation, par Anne Ganivet-Poumellec
Un et « dur », par Hervé Castanet
S'inscrire aux Journées ? Oui, vite !, par Patricia Bosquin-Caroz
Chanter sous la douche, par Yves Depelsenaire
Note sur le thème des Journées, par Jean-Pierre Deffieux
Vous viendrez, par Sonia Chiriaco
Au-delà de l'autisme, par François Ansermet


Nenhum comentário: