JOURNAL DES JOURNÉES
le vendredi 4 décembre 2009, édition de 15h 51
N° 66
L’INDE, TERRE DU PARADOXE
par Danielle Martheleur
Je crois qu’il n’est pas de pays au monde qui rassemble plus de paradoxes, autant visuels que psychiques ou spirituels. La plus grande beauté côtoie la plus grande laideur, la pauvreté absolue côtoie la richesse éblouissante et les parfums subtils, les odeurs nauséabondes. Si l’on arrive en Inde l’esprit encombré de références occidentales, on est submergé par la panique. Tous nos repères et nos barrières de sécurité s’écroulent. Tout est possible, et cette liberté d’expression peut apparaître comme un immense désordre aux yeux des grands obsessionnels que nous sommes.
Telle une mer turbulente, l’Inde est en perpétuelle agitation. Il ne sert à rien de vouloir résister, d’essayer de nager dans un but précis ou à contre courant. Il faut se laisser aller, lâcher prise. Être fluide et prêt à la découverte. Et au-delà de toute idée reçue, faire confiance. Car si l’Inde peut être terriblement violente, c’est aussi le seul pays à avoir conquis sa liberté par la non-violence.
Lorsque nous nous promenons dans une ville indienne, la circulation est si dense, si anarchique, que nous pouvons être tétanisés devant ce flot ininterrompu de vélos, voitures, camions, chars à bœuf, et bus que rien n’arrête, hormis les vaches sacrées, qui, d’un pas lent et majestueux, traversent les rues sans se préoccuper des klaxons continus.
Les femmes les plus pauvres arborent fièrement des saris, forme unique à l’infinie variété de couleurs. Leurs regards de lumière noire nous attirent vers des profondeurs inconnues, leurs sourires nous renvoient une blancheur insolente. Tant de beauté alliée à tant de pauvreté n’est-ce pas paradoxal ? Ne possédant rien, n’ayant aucun avenir prévisible, aucune sécurité, d’où leur vient cette sérénité si ce n’est de l’intérieur ?
Découvrir l’Inde est comme regarder le monde à travers un kaléidoscope : mille couleurs, mille dieux apparaissent ou disparaissent au profit de nouvelles couleurs, de nouveaux dieux, certains incarnant la chose et son contraire. Kali est à la fois la déesse de la destruction et celle de la création. Tous ces dieux ne sont que la « manifestation » dans le monde des phénomènes d’un Dieu unique, le Tout, dans lequel le temps et l’espace sont confondus, illimités, sans commencement ni fin.
La frontière que nous élevons en Occident entre vie et mort, est, pour les hindous comme pour les bouddhistes, une illusion générée par notre incapacité à imaginer l’infinitude de la Vie, qui, telle une médaille, comprend deux facettes : vie et mort. Alors que le corps retourne à la terre, l’âme se dissout dans la Grande Lumière. En chacun de nous un éclat d’éternité existe. Nous le pressentons, parfois, en de rares moments où le temps paraît suspendu, et où une paix intérieure irradie tout notre être. Certains renient cet éclat d’éternité, d’autres l’utilisent et flattent leur ego en se faisant passer pour des prophètes, d’autres le deviennent, tels Bouddha, le Christ ou Mahomet, considérés comme avatars ou incarnations de Dieu. Selon la tradition indienne, il y a deux réalités. La réalité ultime, l’Unité, et la réalité relative, la dualité.
Se réaliser signifierait avoir atteint cette réalité ultime. Si ce n’est dans cette vie, alors dans une autre – presque tous les Indiens croient en la réincarnation. Alors qu’elle peut avoir en Occident un aspect positif, en Inde la réincarnation est plutôt négative, car elle signifie que nous n’avons pas atteint le nirvana au cours de notre passage sur terre, donc que nous devrons revivre, travailler et souffrir.
En Inde, l’enseignement et le respect des religions sont si vivants, qu’ils imprègnent chaque acte de la vie quotidienne. Le sacré et le profane sont intimement liés. La religion « relie » le monde du visible au monde de l’invisible et nous savons, depuis que la science est allée au-delà du visible, que l’invisible existe.
UNIVERSITÉ JACQUES-LACAN
en formation
Séminaire de recherche
Alain Grosrichard
le philosophe et son turc
(avatars du prophète au temps des lumières)
Depuis la chute de Constantinople, en 1453, le Turc (et par métonymie le “mahométan”), n’a cessé de hanter l’Europe chrétienne. Au siècle des Lumières, il ne la menace plus militairement. Mais il est devenu l’objet fantasmatique d’une “hainamoration” très singulière, où la littérature trouve matière à faire rêver, même si parfois le rêve vire au cauchemar. Sa religion, ses mœurs, le “despotisme” de sa politique donnent à penser aux philosophes. De Montesquieu à Condorcet, en passant par Diderot, Rousseau et Voltaire, chacun prend position sur la personne et l’enseignement du Prophète. Celui que met en scène Voltaire obtient un succès monstre. Normal : imposteur chargé des pires crimes, “Tartuffe les armes à la main”, ce Mahomet-là est le plus infâme de tous les monstres. Mais à travers lui, c’est le Pape et son Église que Voltaire prend pour tête de Turc. Et Voltaire l’historien réhabilite ce Mahomet défiguré pour la bonne cause par Voltaire le poète. Pour un peu, il en ferait même un “philosophe” avant la lettre. Il n’est d’ailleurs pas le seul à lui prêter cette double figure, sous les traits de laquelle le Turc continue de nous hanter. Mais qui, nous ? De quel sujet, lui-même divisé, ce Turc hérité des Lumières demeure-t-il le révélateur, dans l’Europe d’aujourd’hui ? Pour traiter la question, on évitera le panorama et l’histoire des idées. On procédera plutôt à une lecture clinique de quelques textes symptomatiques.
C’est sur les rives du Bosphore que Candide, parvenu au terme de son périple, énonçait sa maxime : “il faut cultiver notre jardin”. Pourquoi ne tenterions-nous pas d’y cultiver aussi un lopin de Champ freudien ? Contact : alain.grosrichard@noos.fr
WITZ, THÉÂTRE, ÉNONCIATION
par Anne Lysy-Stevens
Jean-Daniel Mattet soulignait que “s’engager dans le dispositif de la passe à l’ECF est fort différent que d’intervenir devant le public des Journées”, la grande différence étant “l’existence du filtre des passeurs” dans le dispositif.
Et en effet, la structure du dispositif inventé par Lacan est ternaire ; Lacan renvoie d’ailleurs à la “Dritte Person” du Witz pour caractériser cette forme de transmission très particulière. Sans doute la procédure était-elle calculée en fonction de l’enjeu en 1967 : extraire quelque chose de l’ordre du mathème à propos du passage à l’analyste, au-delà des effets rhétoriques des dits du passant. On reconnaît là la “croyance extrême à la logique” de Lacan à cette époque, comme Jacques-Alain Miller l’a souligné dans sa présentation du thème de l’AMP : “Semblants et sinthome”.
Ces dernières années, J.-A. Miller a évoqué à plusieurs reprises “le théâtre de la passe”, en tirant les conséquences du dernier enseignement de Lacan, notamment du texte de 1976, “l’esp d’un laps”. Ici les effets de séduction rhétoriques ne sont plus évités. Les corps sont en présence. Chaque témoignage de passe, comme “hystorisation”, “assume le mensonge de la vérité” ; et “le spectacle des témoignages” répond aussi au “désir de notre communauté”. Les récentes Journées de l’ECF ont été un tel théâtre, leur style me paraît en résonnance avec le dernier enseignement de Lacan.
Arrivée à ce point, je m’arrête, j’ai le sentiment que quelque chose cloche : que suis-je en train de dire ? Que la procédure est datée, qu’elle ne convient plus ? Pas forcément, pas plus que le dernier enseignement ne rend complètement caduque ce qui précède. Par ailleurs, quand J.-A. Miller parle de théâtre, il le fait à propos d’un temps de la passe, celui où les AE enseignent – un temps P3, dirais-je, pour le distinguer du temps P1 (moment de passe dans l’analyse) et P2 (procédure de la passe). Je compare donc deux choses différentes, je fais une erreur de logique ! Alors, j’efface et j’oublie l’idée qui m’était venue ?
J’en tire une question : comment définir l’énonciation aujourd’hui et comment la faire “passer” ?
QUELQUES REMARQUES D’UN PASSEUR
par Annie Dray-Stauffer
J'ai été passeur cinq fois. Deux de ces passants ont été nommés AE. La première passante pour laquelle j'ai eu à témoigner, a été nommée AE. Elle avait déjà effectué un travail remarquable, à la fois de condensation des moments clefs de ses analyses et de construction de son cas. Je n'ai compris que plus tard à quel point elle avait elle-même “préparé” mon propre travail qui a quand même consisté en un ordonnancement, une condensation et une filtration de ses dires. Elle ne m'a remis aucun texte écrit et je trouve contraire à l'esprit de la passe de le faire, la fonction de plaque sensible du passeur s'en trouvant alors quelque peu court-circuitée. L'exposé de ce cas au cartel de la passe s'est fait dans des conditions particulièrement intéressantes, sous la forme d'une discussion avec l'autre passeur et les membres du cartel, dans un climat exempt de tout agacement, et marqué pour chacun d'un formidable désir de savoir. Je lisais le texte que j'avais écrit et chacun m'interrompait pour avoir des précisions ou compléter mes dires avant qu'une conversation plus libre ne s'instaure.
Pour le second passant nommé AE – ma quatrième passe –, il en fut autrement. Le passant se centra surtout avec moi sur les détails de la fin de sa cure, le mode de satisfaction que celle-ci lui apportait et son nouveau rapport au savoir, à la vérité et à l'ignorance. Moi-même taraudée par une interrogation sur la fin de ma cure (il s'était écoulé 2 ans et demi), je n'ai pas posé suffisamment de questions sur les détails de son très long trajet analytique, avec lequel il me semblait avoir pris une grande distance, ce qui me fut reproché par certains membres du cartel. Il m'en avait toutefois donné les points essentiels, les moments de passe. En revanche, j'émets l'hypothèse que de l'avoir laissé dire a peut-être permis qu'il aborde une question qu'il n'a pas abordé avec le deuxième passeur, tournant autour de l'acquisition d'un savoir y faire avec le vide. Cela me semblait témoigner d'un point d'avancement de son travail qui me faisait penser qu'il pouvait être nommé AE, ce que j'ai dit aux membres du cartel. Après mon exposé, plutôt que de partir, comme cela se fait habituellement pour laisser place à l'autre passeur, j'ai demandé à rester. Entendre cet autre témoignage m'intéressait tout spécialement, du fait de ce que je viens de dire, et aussi parce que les lacunes de mon exposé me laissaient sur ma faim. J'ai été surprise par la différence entre nos deux témoignages. Celui de l'autre passeur était extrêmement précis sur tout le déroulement des différentes tranches d'analyse. Elle en a été également frappée, quand elle a lu mon texte, après coup.
Ces deux expériences si dissemblables me semblent bien éclairer “la solitude” et l'ignorance du passeur jusqu'à maintenant, quel qu'ait été son effort pour lire tout ce qui s'était écrit sur la passe, et bien peu sur la position du passeur. Je dis bien jusqu'à maintenant, car il me semble qu'après ce que nous lisons tous depuis les Journées, on ne sera plus passeur de la même façon : il se dit maintenant de façon beaucoup plus directe que le passeur n'a pas à être le “secrétaire” du passant. Mes deux expériences me l'ont appris en effet, mais je ne le “savais” pas, et il est essentiel que cela soit dit aux futurs passeurs, ainsi que d'autres points abordés par les uns et les autres au cours de ce débat. Le “silence des cimes” qui a régné risque d'assourdir la voix du passant, et la passe d'en être bâillonnée.
PASSEUR « EN DIFFICULTÉ »
par Fernand Gasser
Ayant été passeur (pour deux passants), je voudrais apporter ma contribution au débat en mettant mon expérience et ma question en regard d’un point de la théorie.
Passeur “en difficulté”1, j’étais dans un certain malaise, pas sans lien avec le fait qu’aucune des deux passes n’a donné lieu à une nomination d’AE.
Lacan écrit que le passeur assure “une fonction de médiation”, qu’il “est la passe”, “une plaque sensible”.
Dans les transmissions que j’ai faites aux cartels, je pense avoir été un secrétaire fidèle au discours des passants. J’ai évidemment réécrit un texte, temps oblige, plus court que leur témoignage.
La passe est définie comme une expérience de déduction et non de déchiffrage : je renvoie au travail de A. Zaloszyc2, pour avancer que cette déduction viserait le point obscur (Unerkannt) – et/ou – en émane, point que l’Autre cherche à saisir, à faire entrer dans ses circuits et enclos selon les deux modalités de Phi et “petit (a) sur moins phi”.
La réponse du cartel : “il y a” (passe et AE) se logerait dans l’empreinte, dans la trace effacée du passage du zéro au Un (cf. Frege) pour indiquer que le sujet se serait dégagé de cette trace ?
“Il y a” désignerait donc un nouage desserré et la perspective d’Un nouveau ?
Et le passeur là dedans ? Lui aussi enthousiaste… ou timoré, est chargé, par l’Autre de l’École comme par le passant, d’être le porte-parole de ce dernier, il est chargé de ne pas brouiller les veines du roc qu’il a pu repérer, au moins dans un tâtonnement déductif ?
Je conclurai ces questions – hypothèses à vérifier pour dire un mot me concernant : par la suite je me suis présenté à “la passe à l’entrée”, démarche qui peut s’entendre comme un “t’y mords pas encore”…
1. Lacan : « Une Procédure pour la passe ».
2. A. Zaloszyc : « L’Unerkannt et la jouissance liquide ». LM 275.
PETIT TEXTE
par Nathalie Georges
1 - Le JJ qui me donne le tournis mais comme il est impossible de saisir una por una, ces particules élémentaires que nous sommes et que vous ne cessez pas, cher Jam, d’accélérer, il faut bien que je m’applique. Donc, comme dirait Bernard This, je ne vous dis pas merci.
2 - « Ralentir, travaux ». Je me dis que c’est l’effet paradoxal que vous obtiendrez, sans le viser.
3 - La passe comporte cette lente hâte, elle est le noyau de la nouvelle érotique du temps que la psychanalyse implique et qui irrigue l’École. Je me dis qu’elle sera poétique ou ne sera pas. Elle est, en tout cas, là, pour chacun, c’est patent.
4 - Cher Philippe Chanjou. Je vous remercie de m’avoir adressé votre texte des Journées (à ma demande). Il m’a saisie ; dans les intervalles que votre écriture enserre, un tissage souple et serré témoigne du parcours des réseaux signifiants qui ont ponté et irrigué l’entre deux mères de la conjoncture de votre naissance. J’y piste sans me donner aucun mal la présence obstinée d’un véritable psychanalyste, dont il me semble que le patronyme (que je crois déduire et savoir plutôt que deviner ou connaître) forme le chiffre d’une destinée frappée au coin de la psychanalyse. Je crois même reconnaître son style, net, clair, sans concessions. Rien à voir avec une identification, donc.
5 - Il me semble que votre Selbstdarstellung opère une rectification de la passe après coup. « Faites-vous connaître de gens connus » énonçait non sans humour un peu noir Sophie Bialek, au moment où elle allait être AE (début des années 90). Votre transfert à l’École vous porte à témoigner sans méchanceté de sa capacité de black out. Black in, donc. Nous allons y travailler, nous les maudits, les démineurs (les grandes personnes ?).
Congrès AMP du 26 au 30 avril 2010
Hébergement à Paris
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Autour de Céline
Monique Liart : L’antisémitisme de Céline
"Le barbare, c'est d'abord l'homme qui croit à la barbarie."
Claude Lévi-Strauss
L'antisémitisme repose sur la croyance que la race juive est responsable de tous les maux qui frappent notre société. Hitler fait reposer cette notion de "race" sur des preuves génétiques. Or les recherches scientifiques ont prouvé que la génétique n'explique en aucune façon la différence des races et que donc la notion même de "race" est tout à fait bancale. Claude Lévi-Strauss propose de remplacer ce concept par celui de culture et il prône le respect pour la diversité des cultures afin de permettre le dépassement de l'ethnocentrisme européen qui implique l'idée de supériorité de la culture occidentale sur les autres cultures.
Sur le plan scientifique, on peut donc dire que l'antisémitisme est un délire collectif. La race aryenne et la race juive n'existent pas. Claude Lévi-Strauss écrit : "C'est dans la mesure même où l'on prétend établir une discrimination entre les cultures et les coutumes que l'on s'identifie complètement avec celles qu'on essaye de nier. En refusant l'humanité à ceux qui apparaissent comme les plus "sauvages" ou "barbares" de ses représentants, on ne fait que leur emprunter une de leurs attitudes typiques. Le barbare, c'est d'abord l'homme qui croit à la barbarie." (Anthropologie structurale deux, ch. XVIII, "Race et Histoire", Plon, p. 384.) Il ajoute : "Mais le péché originel de l'anthropologie consiste dans la confusion entre la notion purement biologique de race (à supposer, d'ailleurs, que même sur ce terrain limité, cette notion puisse prétendre à l'objectivité, ce que la génétique moderne conteste) et les productions sociologiques et psychologiques des cultures humaines. Il a suffit à Gobineau de l'avoir commis pour se trouver enfermé dans ce cercle infernal qui conduit, d'une erreur intellectuelle n'excluant pas la bonne foi, à la légitimation involontaire de toutes les tentatives de discrimination et d'oppression." (Ibid., p. 378.) Gobineau est un écrivain français qui a écrit L'essai sur l'inégalité des races humaines (1853), où il prétend fonder sur une base physique et réaliste la théorie de la supériorité de la race nordique, germanique.
Philippe Sollers dit ceci à propos de l'antisémitisme de Céline : "On voit très bien dans les lettres à Paraz ce qui tombe dans le vocabulaire emprunté de l'époque. Il y est toujours question des juifs dont il pense qu'au fond, ils sont comme lui : messianiques, mystiques et curieux. Alors que pour les aryens, il n'y a que des ‘abrutis de souche’. Brusque revirement. Ce terme d'‘abrutis de souche’ me plaît beaucoup, et je reconnais avoir affaire, sans arrêt, à des abrutis de souche… notamment de cette région maléfique qu'il faut appeler le centre de l'Hexagone. Le terme "aryen" me fait rire car il est tiré d'une conception très dix neuvièmiste. Que cela ait été popularisé comme étant un terme pouvant être mis en balance avec le mot ‘juif’ est vraiment une très grosse erreur d'oreille, de vocabulaire et même de connaissance. De toute façon, l'antisémitisme est une connerie." (Le Magazine des Livres, n° 18, juillet-août 2009.)
Céline s'est probablement servi du délire collectif de l'Allemagne nazie pour soulager sa souffrance, pour expliquer la "cloche à gaz" dans laquelle il a passé sa jeunesse, les coups et les insultes reçus de son père, ses "douze métiers et treize misères" où il était le garçon de courses de sa mère (dentellière), sa frustration de ne pouvoir aller à l'école, son expérience des prisons au Danemark. Selon Philippe Sollers, ce fut son voyage à Leningrad en 1936 qui le rendit fou et qui déclencha sa crise antisémite : "Une prison de larves. Toute police, bureaucratie et infect chaos. Tout bluff et tyrannie". Hitler lui fournira le signifiant à tout faire pour expliquer le chaos du monde moderne : Le Juif ! L'école des cadavres, Bagatelles pour un massacre, Les beaux draps ont été écrits sous l'impulsion de cette certitude. Après la guerre, il a été prouvé que Céline n'avait commis aucun acte direct visant à la déportation des juifs. Le Dr Christian Millau dit de Céline qu'il a souffert d'un "antisémitisme obsessionnel : à la limite de la parodie volontaire". Il faut toutefois rester vigilant à propos de certains écrits qui pourraient continuer à servir de légitimation – même involontaire – à d'autres tentatives de discrimination dont notre société actuelle est le théâtre. Comme le rappelle Philippe Sollers : "Le mauvais goût conduit au crime" (Stendhal).
Dans ses entretiens filmés (cf. Interview de Pierre Dumayet, 1957), Céline dit qu'il n'est pas violent mais qu'il a subi beaucoup de violences. La violence de son style s'explique par le fait qu'il a voulu prévenir l'Europe de l'arrivée d'une seconde guerre mondiale, mais on ne l'a pas entendu. Il s'identifie à la chienne intelligente et raffinée d'un attelage du grand Nord : elle aboie pour prévenir l'équipage de la présence d'une crevasse dans la neige et lui éviter de glisser vers le gouffre. Mais la surdité autour de lui fut totale. Il n'a donc pas pu nous éviter la seconde guerre mondiale. Par son style impressionniste, "le rendu émotif intime", il voulait rendre l'émotion par les mots, "sans lui laisser le temps de s'habiller en phrases". La violence de la guerre était dans le mot. Par la cadence, le rythme, Céline tentait de "maintenir un délire en élan" pour nous avertir du danger qui revenait : "Chant, danse, rythme, cadence, poésie / Le truc, le truc, le truc, le truc / Encore, encore, encore, encore / Va-t-on finir par l'entendre ? / Et moi par la même occasion ?… /
Selon Jacques-Alain Miller, "Céline s'évertue à faire rentrer l'objet petit (a) dans le signifiant, d'où les effets d'explosion dans le signifiant". Cet objet est excrémentiel, ajoute-t-il. Ceci explique notre répulsion à lire cette féerie apocalyptique qu'est son œuvre. Et cependant Céline, ce poète du Mal, insiste : par son style, il saisit la poésie, "car le fond de l'Homme malgré tout est poésie"… Il se vit comme léger, alors que les autres sont si lourds… Quant aux idées politiques de Céline, on assiste à des déclarations qui relèvent soit du délire, soit d'extraordinaires pirouettes verbales de funambule – on sait l'importance qu'a la danse pour lui. "Le contenu importe peu, seul compte le style", dit-il. Outre le fait que ce solitaire de Meudon annonce l'arrivée des chinois aux portes de la France, il explique le fait qu'il ait parlé du château qui abrita le quartier général du maréchal Pétain dans Un château l'autre de cette façon : il rend hommage au maréchal Pétain pour avoir fait un retour à la vraie aristocratie, celle du Moyen-Age, celle qui ne laissait pas le peuple entrer dans ses châteaux. Louis XIV a été un aristocrate décadent parce qu'il était démocrate et a laissé entrer le peuple à Versailles, jusqu'à l'inviter à son petit déjeuner. Autre exemple : le seul contact qu'il eut officiellement avec l'envahisseur allemand fut le jour où il fut invité par l'ambassadeur. Comme il était silencieux, Otto Abetz lui demanda à quoi il pensait. Il répondit qu'il se demandait pourquoi les Allemands avaient mis un juif à la tête de leur armée. Stupéfait, l'ambassadeur simula un malaise de la part de Céline et le fit reconduire chez lui. S'il s'agissait d'un mot d'esprit, il est difficile de saisir pour qui il était le plus injurieux, pour les Allemands ou pour les juifs ! Céline a incontestablement un art particulier de l'équivoque. On ne sait pas où est le sujet J.F. Destouches dans le style Céline, ni à qui ce style s'adresse exactement. Seuls les sons comptent, pas le contenu.
Faisons confiance à Philippe Sollers, grand lecteur de textes, pour éclairer cette énigme qu'est Céline et nous montrer comment, après une relecture, ses écrits résonnent aujourd'hui. À lui de nous démontrer "s'il y a un goût qui reste et s'il y a une couleur absolue". Si, comme il l'a dit jadis, Joyce a changé la langue anglaise de telle façon qu'après lui cette langue n'existait plus, il pourra sans doute nous faire reconnaître aujourd'hui que Céline-écrivain a fait un "tour de force harmonique" et a construit une langue nouvelle "à partir d'une fréquence fondamentale". Lire Céline comme on écoute un concert de musique sérielle, un quatuor de Schoenberg ? Peut-être…
forum des psys
L’ÉVALUATION, CULTURE DE MORT
sous la présidence effective de Bernard-Henri Lévy
dimanche 7 février 2010 à la mutualité
inscriptions : à partir de janvier 2010
LETTRES ET MESSAGES
Thomas Svolos : We are moving in the United State
*our finest Study Days yet last month in New York, with superb working of the cases and a major public lecture in an important contemporary art space
*a successful invitation-only internet video-seminar in 2009 in preparation for the Study Days bringing Members and associates from across the country in contact with analysts from five schools of the WAP. In 2010, to be opened to the general public
*a new introductory course via internet videoseminar to reach all the corners of the US for those wanting to know about Lacanian psychoanalysis planned for 2010
*an email distribution list followed by over 400 people
*Lacanian Compass with bigger and bigger issues
*a blog to bring work on the semblant and sinthome from the WAP in English to all in the US who are interested: https://
*more and more demands for analysis and analytic training, in our cities but also from people scattered across the country
*a new presence on twitter to join in the conversation
*speaking for my city: an introductory course on psychoanalysis at one hospital for several years; a monthly patient interview at another hospital; regular "Lacanian Workshop" gatherings to brainstorm theoretical, cultural, social issues; psychoanalysis a critical part in the teaching for psychiatry residents (internes) at the medical school; public events at a contemporary arts center reaching over 100 people, covered on the front page of the local paper
We are ready to move faster. Hypomania, you say--ok!
We are doing what we are doing one by one, as in so many ways we always, do but it is time for a semblant here in the US.
Florence Hougardy : Justine donne des nouvelles de Louise
Oui, Justine Lévy est la fille de BHL. Oui, les trois romans qu’elle a publiés sont largement inspirés de sa vie. Mais si Mauvaise Fille relève d’un genre littéraire récent et parfois contesté, l’autofiction, ce roman est aux antipodes de la presse people. Le personnage de Louise n’est pas le porte-parole de la vie de Justine mais son point d’énonciation. Comme chacun, cette jeune écrivain éprouve que ce qu’elle est comme sujet ne se résorbe pas complètement dans son écriture, qui toujours bute sur un point de réel. Cette expérience particulièrement sensible chez Justine Lévy est le tour de force qui, plus que son illustre famille, explique probablement son succès et parle aux gens de sa génération.
Ce qui est monstrueux, c’est que j’ai zappé maman en faisant un enfant. Voilà ce qui constitue la thématique de ce roman. Une sorte d’insupportable concordance des temps entre une jeune femme qui s’apprête à donner la vie au moment précis où sa propre mère est en train de la perdre. À partir de ce point, l’héroïne va osciller entre entreprise de subjectivation d’une part, et mise en scène du réel des corps d’autre part : “suis-je une mauvaise fille ?” côtoie l’odeur du cancer de la mère ; les questions sur l’amour et la culpabilité envers le bébé flirtent avec l’ouverture du ventre pour césarienne. L’écriture va tenter de cerner ce qui n’épargne pas Louise, cette héroïne qui se débat avec les claques que lui donne la vie mais dont la dimension bloc de culpabilité par laquelle elle se définit n’évacue pas sa responsabilité dans l’affaire.
Ce qui s’écrit sur le jour de l’enterrement de la mère de Louise illustre pourtant un style trop léger pour être qualifié de cynique: Merci, disent les pochards à papa (…). Merci de quoi, me demandera papa, après, dans la voiture ? Je pensais que tu avais compris, je lui réponds en n’arrivant pas à retenir un fou rire. Ils te remerciaient de les avoir rincés pendant des années. Idem quand Louise reproche aux croque-morts d’avoir fait à maman, sur son lit de mort, une bonne mine de travelo. Cette écriture qui témoigne d’une débrouille avec le réel produit, au cœur même de la tragédie, un effet comique et parvient de la sorte à transcender l’angoisse qu’elle contient. Crash filial. Strip-tease du malheur.
Le style est donc vif et fulgurant. Les phrases sont courtes ou hachurées, comme si l’auteur avait écrit après un sprint, haletante. Ce n’est d’ailleurs pas un livre qu’on pose et sur lequel on revient. Non, Mauvaise Fille, ça se lit à toute vitesse.
Avec Louise, Justine Lévy parle aux femmes de sa génération, ces trentenaires aux prises avec les avatars de leur vie de couple, ces jeunes mères auxquelles l’époque impose un questionnement sur cette maternité qui ne va plus de soi et qui fait sauter au visage leur propre division ; ces filles qui, si elles n’ont pas toutes une mère aussi fascinante que celle de Louise, s’y retrouvent sur les thèmes de l’amour et du ravage avec la leur.
À travers ce roman, l’auteur tente de réhabiliter sa mère. Louise en fait un monument, et c’est sur les épitaphes de sa tombe que la petite Angèle apprend à lire.
Prise de position subjective : la lectrice que je suis, elle aussi, en est encore toute haletante.
Tiens ! Il paraît que Mauvaise Fille avait été proposé pour le Goncourt…
Justine Lévy, Mauvaise Fille, Paris, Stock, 2009,198 p.
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vers Rennes 2010
Sonia Chiriaco : Vers l’été
Que s’est-il dégagé des Journées de novembre et qui pourtant n’y était ni annoncé, ni traité ? Une réponse vient immédiatement à l’esprit : le débat sur la passe. Donc sur l’avenir de la psychanalyse dans notre École.
J’ai commencé, en tant que « mentor », à recevoir des textes qui n’ont pas été sélectionnés pour novembre, mais reprennent vie dans la perspective de Rennes. Ces textes – est-ce le hasard ? – m’ont frappée par l’élément qu’ils ont en commun, indépendamment de leur style : ils sont tournés vers l’analyste en devenir, vers l’avenir de la psychanalyse, vers la passe. Ils sont porteurs d’une expérience de la passe, explicite ou non, à savoir l’expérience du passeur en tant qu’elle produit des effets dans sa propre cure. Cela est d’autant plus précieux que l’on souligne actuellement combien ce travail de passeur reste dans l’ombre.
En novembre, nous avons entendu beaucoup de contributions qui dévoilaient, à travers des parcours singuliers, comment l’un ou l’autre était devenu analyste, et même si chacun d’entre nous a souligné que la chose n’était jamais acquise, que la passe était à refaire quotidiennement, que notre formation était infinie, le point vif portait le plus souvent sur ce qui a fait advenir l’analyste. Certes, nous avons aussi entendu des plus jeunes qui témoignaient de leur parcours d’analysant, souvent prometteur.
L’accent, cependant, a rarement été mis sur le devenir, notamment sur la question du pari que l’on fait en nommant quelqu’un passeur. Car la fonction de passeur est un pari, que l’on peut donc perdre ou bien gagner. C’est d’abord un pari sur la transmission : les passeurs sauront-ils transmettre au cartel de la passe le savoir qui leur a été déposé ? Mais c’est aussi un pari sur l’avenir de leur propre analyse : souvent, elle s’en trouve relancée, vivifiée ; parfois, c’est un point d’arrêt qui autorise le sujet comme analyste, sans que son analyse parvienne à se poursuivre.
Il me semble que si nous prenons comme perspective pour Rennes l’avenir de la psychanalyse, en laissant une large place à ce moment particulier du trajet de l’analyste en formation, nous ferons un triple coup : nous mettrons en lumière la fonction de passeur dans ce qu’elle a de plus sensible, à savoir « le passeur est la passe même », en découvrant l’amont et l’aval de son trajet à travers ce prisme, ce qui a fait celui-ci être passeur, puis quels en ont été les effets ; nous aurons alors un aperçu du trajet en devenir, du trajet en train de s’accomplir, in vivo. Nous poursuivrons, en acte, le débat sur la passe.
Autre avantage, nous ne répéterons pas en juillet ce qui fut le suc de novembre. Cela tombe bien : l’automne est un moment d’après-coup, où l’on considère ce que l’on a récolté ; le début de l’été est plus prometteur, c’est le temps des moissons.
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Nous attendons vos contributions pour le blog des Journées de Rennes : réactions, suggestions diverses, réflexions sur le titre de ces prochaines Journées ou sur leur orientation notamment quant au débat sur la passe. Tout format, tout style.
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Vos textes sont à adresser à Caroline Pauthe-Leduc (caro.pauthe.leduc@gmail) et Sophie Marret (sophie.marret@wanadoo.fr)
Pour la rubrique du JJ, les textes (au format défini par Jacques-Alain Miller de 4500 signes maximum) sont à adresser à Jacques-Alain Miller (ja.miller@orange.fr), ainsi qu’en copie à Sophie Marret et Caroline Pauthe-Leduc.
AGENDA AU 4 DÉCEMBRE
par Jacques-Alain Miller
1 – Congrès AMP. La commission d’organisation se réunit ce soir au domicile du directeur du Congrès, Luis Solano ; je serai présent. Décisions à venir sur le programme, les salles, les modalités d’inscription.
2 – Journées de Rennes. Le titre. J’ai pris connaissance des discussions. Rennes est prévu pour constituer le point de capiton de la séquence inaugurée à Paris, et prolongée par le débat sur la passe, qui fut lancé dans ces mêmes pages par Sophie Gayard. En conséquence, je propose comme titre des Journées « Comment naît le désir de l’analyste », illustré de La Naissance de Vénus, de Botticelli, pour autant que, de nos jours, le « devenu-analyste » a toute chance d’être une femme ; d’autre part, la position de l’analyste a, selon Lacan, des affinités, voire une homologie, avec la position féminine. Si l’on trouve mieux dans la semaine qui suit, très bien ; sinon, ceci sera le titre. Proposition au Conseil de l’Ecole : tenir l’Assemblée générale de l’Ecole à Rennes, à l’occasion des Journées. Les mentors, les tapirs. Les mentors sont 12, leur liste est publique. La liste des tapirs est close ; elle est en cours d’établissement par ma secrétaire, elle ne sera pas rendue publique ; les tapirs seront avisés courant janvier, individuellement, du ou des mentors qui leur seront proposés.
3 – Le débat sur la passe. Je m’efforcerai de publier dans le Journal les textes qui me parviendront avant le jeudi 10 décembre, à 20h 00. Une brochure réunira ensuite les plus percutantes et pertinentes des contributions reçues. Les auteurs seront conviés à à la « Conférence sur la passe » que j’organiserai à Paris, sous l’égide du Journal, le samedi 16 janvier après-midi et le dimanche 17 janvier jusqu’à 17h 00. Il sera demandé une participation pour couvrir les frais de local. Les textes envoyés doivent être en attaché, justifiés, soigneusement tapés. Objet : PASSE.
4 – Le volume Navarin des 120 interventions du samedi 7 novembre. Il est demandé aux auteurs désirant figurer dans ce volume de mettre parfaitement au point leur copie sans la refondre, en Times New Roman, corps 12, interlignage 1,5, ou 2, justifié. Titre centré sur le modèle suivant :
Sigmund Freud
mon autoanalyse avec fliess
L’envoi se fera exclusivement entre le samedi 5 décembre à 6h du matin et le dimanche 6 décembre à minuit, aux deux adresses suivantes en même temps : jam@lacanian.net navarinediteur@gmail.com Indiquez comme objet, en lettres majuscules : VOLUME. Sur l’icône, mettez votre nom propre en lettres majuscules, suivi de votre prénom en minuscules. Je décline toute responsabilité à l’endroit des envois qui ne respecteraient pas ces dispositions.
5 – L’Université Jacques-Lacan. Le Conseil d’administration d’UFORCA se réunira en session extraordinaire à Paris le dimanche 13 décembre, de 10h à 13h ; déjeuner jusqu’à 15h. 19 présents, 2 absents excusés. Ordre du jour : modifications des statuts ; J.-P. Deffieux ayant été élu membre du Conseil et Trésorier de l’Ecole (avec nos félicitations), distribution de ses taches pour les deux années à venir ; déclaration légale ; préparation du Forum du 7 février ; refonte de nos Journées annuelles, institution des « Parlements » ; discussion sur les perspectives de l’Université Jacques-Lacan ; création d’une Fondation.
6 – Les Forums des psys. Forum du dimanche 7 février à la Mutualité : « L’Evaluation, une culture de mort », sous la présidence effective de Bernard-Henri Lévy. Avec : Alexandre Adler, Agnès Aflalo, Christian Charrière-Bournazel, Roland Gori, Jacques-Alain Miller, Jean-Claude Milner, François Regnault, Yves-Charles Zarka, et d’autres. A l’occasion de ce Forum, sortie du numéro 10 de LNA-Le Nouvel Ane ; responsable de la rédaction : Agnès Aflalo ; bouclage : le dimanche 13 décembre. Forum le dimanche 11 avril à la Mutualité, sur la justice en France ; précisions à venir.
2010
16 et 17 janvier : Conférence du Journal sur la passe (fermé)
23 et 24 janvier : Journées du RI 3 à Bordeaux
7 février : Forum des psys sur l’évaluation
11 avril : Forum des psys sur la justice
26-30 avril : Congrès de l’AMP (semi-ouvert)
26 et 27 juin : Journées de la NLS à Genève
10 et 11 juillet : Journées de l’Ecole à Rennes
9 et 10 octobre : Journées de l’Ecole à Paris
http://www.causefreudienne.org/
ECF 1 rue Huysmans paris 6è Tél. + 33 (0) 1 45 49 02 68
diffusé sur ecf-messager, forumpsy, et amp-uqbar
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